Les belles aux bois dormants

Photographie : Carven
Certaines maisons traversent les âges avec en tête de proue des capitaines à fortes personnalités donnant l’impulsion nécessaire à une direction durable, comme Chanel, Dior, YSL et Chloé, alors que d’autres, pourtant incontournables, peinent à se réinventer et tombent parfois dans l’oubli. A force de rachat, de changement d’organisation, de révision de budget et de nouvelle, ou d’absence de direction artistique, certaines enseignes ne voient pas le bout du tunnel. Petit tour d’horizon de ces belles endormies qui ont déjà rencontré leur prince charmant, ou non…
Guillaume Henry a définitivement imposé son style chez Carven qui n’avait plus vraiment le vent en poupe : une silhouette des temps modernes, élégante et preppy. Après rachat, balade entre haute couture et prêt-à-porter, la maison renoue avec le succès commercial et d’opinion grâce à un savant mélange de valeurs traditionnelles ‘Carven-niennes’ et la pincée de modernité du jeune directeur artistique prodige. Aujourd’hui véritable coqueluche des starlettes et des rédactrices de mode (Alexa Chung en est l’exemple parfait), Carven est enfin apprécié pour un style identitaire. A savoir, si l’histoire se répétera si Guillaume Henry décide de lever les voiles…
Autre rescapé du temps, Joseph. Célèbre pour avoir été l’inventeur du concept store et pour ses pantalons impeccables, le regretté Joseph Ettegdui avait encré un style influent pour la mode européenne. Après une petite traversée en eaux troubles , c’est un ancien acheteur de notre chère Colette nationale qui a su trouver les mots et les coups de crayons pour tirer hors de l’eau la maison so British. Petit lifting oblige, la marque, rachetée par le groupe japonais Onward Kashiyama, renoue avec ses valeurs d’origines en proposant des basiques dans des matières nobles avec une touche de décadence punk et de chic fuselé. Joseph, on adore.
Après des époques marquées par le duo Clements Ribeiro, puis par le talentueux Cédric Charlier (qui aujourd’hui vole de ses propres ailes), il était périlleux pour Cacharel, maison très française de trouver ceux qui sauraient faire vibrer le fameux Liberty. C’est donc un nouveau duo composé par Ling Liu et Dawei Sun qui officie aujourd’hui au poste très convoité, mais néanmoins risqué à l’extrême, de directeur artistique. Malheureusement, les débuts sont laborieux et la pilule a du mal à passer, aussi bien auprès des leaders d’opinions que des commerciaux. Problème de gamme en baisse, de manque de parti pris, de manque de piquant… qu’à cela ne tienne, même si le prochain défilé est annulé, les collections ont été présentées sur le salon professionnel du Tranoï, suite au prochain épisode.
Autre belle endormie en péril, la maison Léonard. Après le passage éclair du brillantissime Maxime Simoens (celui qu’on appelle le nouveau YSL), c’est Raffaele Borriello qui a eu la dure charge de reprendre les rênes de cette maison décidément en quête de repères. Les imprimés Léonard, identifiables entre tous, on les connait et quel challenge de les remettre au goût du jour ! Il semble que le beau Raffaele ait tapé d’un coup de maître avec son premier défilé, ayant été très bien perçu par les rédactrices et les leaders d’opinion. A voir, si cela suffira à donner un nouveau souffle et un peu d’ardeur à cette maison …
Enfin, le cas d’école d’Ungaro. On pourrait dire à juste titre qu’Ungaro s’est quelque peu perdu dans les méandres de la mode : Après un passage éclair Lindsay Lohan (?), de la très people Estrella Archs, du pointu Esteban Cortazar et du talentueux Giles Deacon, la marque s’est reposée un temps sur son équipe créative forte de 35 employés, au lieu d’un directeur artistique en bonne et due forme. N’ayant pas trouvé le succès avec cette solution provisoire, la maison a appelé à la rescousse Fausto Puglisi pour insuffler un vent de fraîcheur et de jeunesse. Réponse dans quelques semaines pour voir si la magie opère.
